Les universités québécoises face à l’imposition de nouveaux quotas pour les admissions internationales

Au Québec, les universités font face à une nouvelle vague d’incertitudes alors que le gouvernement Legault impose un quota de réduction de 20 % des admissions internationales, accentuant les défis posés par les restrictions fédérales déjà en place.

04 mars 2025

La fin février a marqué une nouvelle période d’ajustement et d’incertitudes pour les universités québécoises, alors que le gouvernement provincial a émis un nouveau quota de réduction de 20% des personnes étudiantes internationales admises dans les établissements d’enseignement. Cela survient quelques mois après l’annonce du gouvernement fédéral d’une réduction générale de 10% du nombre total de permis d’études délivrés au Canada. 

Le nouveau quota établi pour les universités québécoises prévoit un maximum de 63 299 demandes d’admission de personnes étudiantes internationales et le nombre maximal de demandes varie d’un établissement à l’autre

De plus, la province a retiré les membres du corps professoral universitaire du traitement simplifié d’immigration. Pour 2025, la liste recense 76 professions, lorsqu’elle en comptait plus de 267 en 2024. 

Les inscriptions en chute libre 

Le directeur général de l’Institut national de recherche scientifique (INRS), Luc-Alain Giraldeau, regrette ces décisions. « 67% de nos étudiants sont issus de l’international et 49% des professeurs viennent de l’international. Avec toutes les mesures annoncées, nos inscriptions venant de l’international ont baissé de 35% en 2024 et les quotas imposés aujourd’hui par Québec sont basés sur ces chiffres. Alors, quand on dit qu’on maintient la stabilité, ce n’est pas vrai, c’est la stabilité après la chute des inscriptions à la suite des quotas du gouvernement fédéral. »  

Du côté de l’Université Laval, c’est sans surprise que l’établissement a reçu la nouvelle. « On attendait ces nouveaux chiffres, mais cela dit, nous demeurons très inquiets vis-à-vis de ces annonces gouvernementales autant fédérales que provinciales », déplore François Gélineau, vice-recteur aux affaires internationales et au développement durable. « Cette série d’annonces a eu comme impact la diminution des nouvelles inscriptions d’étudiants internationaux de 22% pour l’automne 2024 et de 25% en 2025. Donc le nouveau quota, nous ne l’atteindrons par car nous n’avons pas assez de demandes d’admission. » 

Une image ternie 

« Ce qui nous inquiète beaucoup, ajoute M. Gélineau, c’est l’attractivité de l’Université Laval comme celle des autres universités québécoises et même canadiennes. La réputation du Canada et du Québec comme milieu d’accueil pour les étudiants internationaux a été affectée. » 

Le responsable se préoccupe également du retrait des professeures et professeurs d’universités du traitement simplifié d’immigration. « Quand on veut faire des recrutements internationaux, notamment avec les Chaires d’excellence de recherche du Canada , on veut aller chercher les meilleurs candidats et candidates et assurément les champions et championnes internationaux. Les contraintes imposées par le processus d’immigration régulier font qu’on n’a pas accès à ces candidats, donc on perd de la compétence. C’est la même chose avec les étudiants internationaux. » 

Préoccupations du côté de la recherche 

La baisse des inscriptions suscite des inquiétudes quant à ses répercussions sur la recherche scientifique et le financement des institutions.  

« Pour nous, ce n’est pas une question de frais de scolarité, c’est une question de capacité de recherche et d’innovation », ajoute M. Gélineau. « Par exemple, en sciences et génie ou en santé, 75% des étudiants au doctorat sont internationaux, ce sont des gens qui contribuent à nos capacités de recherches et d’innovation. » 

« Oui, il y aura des pertes de revenus, mais ce sont des peanuts à côté de l’économie québécoise, parce que ça nous en prend de l’innovation, c’est comme ça qu’on s’enrichit et cela passe par la recherche », complémente M. Giraldeau.  

De son côté, l’Université Concordia a abondé dans le même sens via communiqué. « Cette décision place le Québec dans une situation très défavorable pour le recrutement de talents internationaux par rapport aux universités du reste du Canada. Les étudiants internationaux apportent d’importantes contributions à l’économie, la société et la culture du Québec et sont essentiels à la réalisation des objectifs de la province en matière d’innovation. » 

Des réajustements en vue 

Face à ces défis, les universités québécoises sont contraintes d’ajuster leurs stratégies de recrutement. « Nous avons déjà commencé à changer nos façons de recruter, partage M. Gélineau. On porte beaucoup plus attention aux candidats, on les accompagne dans le processus d’immigration. » 

« Les étudiants qui proviennent de l’international vont regarder ailleurs, ils n’iront pas où ils ne sont pas voulus », ajoute-t-il.  « Je pense que le Québec et le Canada en ont pour des années à reconstruire leur réputation à l’international. La solution c’est d’une part de la reconstruire et d’autre part de valoriser les études en sciences au Canada ».  

Appel au dialogue 

Le vendredi 28 février, une lettre signée par les chefs d’établissements des huit universités à charte  du Québec a été publiée dans La Presse. Cette lettre critique la gestion des politiques publiques par le gouvernement du Québec, qui impose des décisions aux universités sans concertation, créant confusion et incertitude. Selon les dirigeantes et dirigeants, ces décisions risquent de nuire à la réputation du Québec, tant sur le plan académique qu’économique. Les auteurs appellent le premier ministre à établir un dialogue avec le réseau universitaire pour mieux faire face aux défis sociaux actuels et rappellent que les universités sont des alliées essentielles dans le contexte international actuel. 

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