Combler le fossé entre science et politiques
La communication des résultats de recherche avec les décideurs doit absolument faire partie du curriculum.
La pandémie de COVID-19 a mis en lumière les liens entre science, société et politiques. Si l’on veut que nos décideurs continuent de fonder leur processus décisionnel sur la science, on doit fournir aux chercheurs les outils nécessaires pour y contribuer, à commencer par la formation et l’expérience.
Le printemps dernier, nous étions parmi les 25 chercheurs émergents du pays à participer au programme Science to Policy Accelerator (S2PA) – une nouvelle initiative de l’organisme à but non lucratif Evidence for Democracy visant à développer les connaissances et compétences des chercheurs pour faciliter leur contribution à l’élaboration de politiques. En mettant en commun nos réflexions découlant de nos expériences respectives, nous avons dégagé une vision de ce à quoi pourrait ressembler l’avenir de la formation dans le domaine. Nous vous la présentons ci-dessous.
« Mieux vaut tard que jamais » n’est jamais la meilleure option
Pour que la prochaine génération de chercheurs s’implique davantage dans la conception de politiques fondées sur des données probantes, elle doit avoir l’occasion de découvrir le milieu et de s’y frotter, et ce, assez tôt dans son parcours. Or, on encourage rarement les scientifiques à réfléchir à l’influence de leurs recherches sur les politiques publiques. Ce n’est qu’aux cycles supérieurs (et encore), que les liens entre science et politiques commencent à être explorés. Souvent, il faut rencontrer un collègue ou un mentor initié à la question pour entendre parler de formations sur le sujet. Il faut que ça change.
Plusieurs obstacles doivent être pris en compte
Ces dernières années, différentes initiatives permettant aux scientifiques de toucher à l’élaboration de politiques ont vu le jour, notamment des programmes spécialisés et du recrutement ciblé, qui ont toutefois leurs limites. Par exemple, les candidats doivent généralement posséder une vaste expérience dans le domaine pour être admissibles, ce qui complique la transition pour ceux provenant d’un milieu exclusivement scientifique. Qui plus est, les occasions hors du Québec et de l’Ontario sont rares et souvent très coûteuses. Plusieurs programmes de formation ne sont offerts que de manière ponctuelle, ou ne comportent pas de volet pratique, ce qui ne prépare pas bien les scientifiques au travail inhérent à l’élaboration de politiques.
Il faut plus qu’un simple atelier
L’exposition aux enjeux de politiques publiques pourrait – devrait! – se faire bien plus tôt dans notre parcours. Si suivre un seul cours de chimie ne fait pas de nous un chimiste, un seul atelier sur les politiques publiques ne suffit pas à maîtriser le sujet.
Le curriculum au secondaire pourrait intégrer les avenues possibles en politiques publiques aux cours d’univers social, de science et d’orientation de carrière, et à partir du premier cycle universitaire, la question pourrait être intégrée à l’enseignement. Les étudiants devraient apprendre à vulgariser la science. Il faut absolument leur montrer comment présenter leurs résultats aux décideurs de la même façon qu’on leur enseigne à rédiger pour des spécialistes. La simulation, le jumelage ou d’autres approches concrètes valent la peine d’être explorés.
Comment initier davantage de scientifiques?
D’abord, l’offre de formation doit prendre en compte les considérations financières et géographiques des participants pour favoriser un accès équitable. Les organisations peuvent endosser les frais de formation ou de déplacement (en cas de financement), opter pour des formules en ligne ou encore pour un programme hybride accessible de partout au pays.
Elles doivent en outre promouvoir plus largement leur offre pour assurer la représentation des membres de groupes dignes d’équité, notamment les personnes autochtones, racialisées, 2SLGBTQ+ ou handicapées, et les étudiants étrangers. Il serait d’ailleurs bon qu’elles recueillent des données sociodémographiques sur les participants (avec leur consentement) pour mieux les rejoindre. Et pourquoi pas aller encore plus loin en intégrant les principes d’équité à leur programme : places réservées aux scientifiques issus de groupes dignes d’équité, bourses, ou souplesse quant à la mise à disposition du matériel pédagogique.
Mais comment en faire une réalité?
Ce n’est que lorsque nous valoriserons, en tant que société, le rapprochement à faire entre science et politiques que nous pourrons mettre ce genre de formation réellement de l’avant. Puisque ce sont eux qui doivent approuver les activités hors laboratoire, il faut au minimum que les directeurs de recherche comprennent tous les avantages d’une telle formation. Et globalement, il faudra l’appui (surtout financier) des diverses parties prenantes, à savoir les administrations et gouvernements, les établissements universitaires et les autres organismes d’élaboration de politiques fondées sur la science. Par exemple, le programme S2PA, qui en était à sa première édition, a pu être offert sans frais grâce à une subvention pilote du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada.
C’est en continuant d’appuyer ce type de programme avec un souci pour la pérennité et l’accessibilité que les parties prenantes telles que le gouvernement fédéral feront en sorte que le Canada favorisera non seulement la recherche de pointe, mais aussi l’application de la recherche aux politiques publiques, le tout au bénéfice de la société.
Adekunbi Adetona s’est jointe depuis peu à Ressources naturelles Canada dans le cadre du Programme de recrutement et de perfectionnement d’analystes de politiques. Ashley Davidson travaille en géochimie environnementale et se spécialise en analyse de traces et en pédagogie des sciences. S. Eryn McFarlane est chercheuse postdoctorale à l’Université du Wyoming. Lucksini Raveendran travaille à l’élaboration de politiques au ministère de la Santé de l’Ontario. Matthew Robbins est chargé de cours au Département de physique et d’astronomie de l’Université de Waterloo. Karthika Sriskantharajah est chercheuse postdoctorale au Département de biologie moléculaire et cellulaire de l’Université de Guelph. Caitlin Fowler est attachée de recherches pour Evidence for Democracy. Farah Qaiser est directrice de recherche et des politiques pour Evidence for Democracy.
Postes vedettes
- Medécine- Professeur.e et coordonnateur.rice du programme en santé mentaleUniversité de l’Ontario Français
- Chaire de recherche du Canada, niveau 2 en génie électrique (Professeur(e))Polytechnique Québec
- Littératures - Professeur(e) (Littérature(s) d'expression française)Université de Moncton
- Droit - Professeur(e) remplaçant(e) (droit privé)Université d'Ottawa
- Doyen(ne), Faculté de médecine et des sciences de la santéUniversité de Sherbrooke
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